Avec l’approche du mois sacré du Ramadan, les ménages marocains s’activent pour se préparer à cette période chargée de spiritualité et de traditions. Cependant, cette année, la joie qui accompagne habituellement cette célébration est mêlée à des inquiétudes croissantes liées à l’accès aux denrées alimentaires. Selon un rapport récemment publié par le Haut commissariat au plan (HCP), basé sur les résultats de l’enquête nationale sur le niveau de vie des ménages, les habitudes de consommation alimentaire ont considérablement évolué entre 2014 et 2022, révélant une transformation profonde du panier alimentaire des Marocains.
Au cours des huit dernières années, le contenu du panier alimentaire marocain a subi des changements significatifs. Ces modifications ne sont pas uniquement le reflet d’une évolution des goûts et des préférences, mais également d’un ajustement contraint face à la hausse des prix et à la dégradation du pouvoir d’achat. Les familles marocaines ont été contraintes de revoir leurs priorités alimentaires, en privilégiant certains produits au détriment d’autres, souvent moins coûteux mais aussi moins nutritifs.
Les données du HCP montrent que les dépenses alimentaires représentent encore une part importante du budget des ménages, mais elles se concentrent davantage sur des denrées de base comme le pain, le sucre et l’huile, au détriment de produits plus diversifiés tels que les fruits, légumes ou viandes. Cette tendance souligne non seulement une adaptation économique forcée, mais aussi une préoccupation grandissante pour la qualité nutritionnelle des repas servis lors du Ramadan.
L’étude met également en lumière un autre aspect inquiétant : le creusement des inégalités sociales dans l’accès à une alimentation saine et équilibrée. Les différences entre les classes sociales se manifestent de manière criante dans les choix alimentaires effectués durant ce mois particulier. Tandis que les familles aisées continuent de profiter d’une grande variété de produits frais et élaborés pour leurs repas de rupture du jeûne, les ménages à faible revenu doivent composer avec des restrictions budgétaires de plus en plus serrées.
Cette disparité sociale se traduit par une double peine pour les populations vulnérables : non seulement elles doivent faire face à des hausses continues des prix des denrées essentielles, mais elles voient également leur capacité à respecter les traditions culinaires associées au Ramadan diminuer. Pour beaucoup, le plaisir de partager des plats traditionnels riches et variés devient un luxe inaccessible.
À mesure que le Ramadan approche, ces constats invitent à une réflexion collective sur la nécessité de renforcer les mécanismes de solidarité et de soutien social. Plusieurs initiatives locales et nationales visent déjà à aider les familles défavorisées à travers des distributions de colis alimentaires et des programmes de subvention. Toutefois, ces efforts demeurent insuffisants face à l’ampleur du problème.
Si le Ramadan reste une période de rassemblement et de partage, il est également un moment propice pour sensibiliser à l’importance d’une alimentation saine et accessible pour tous. Face aux défis socio-économiques actuels, il est crucial de travailler ensemble pour garantir que chaque famille marocaine puisse vivre pleinement ce mois sacré, sans compromettre sa dignité ni sa santé.